My saviour  

6ème mois de la 53e année de Ri Wu - Quelques semaines après la bataille au Nord d’Omashu.

Je vais mieux. Je boite toujours, j’ai encore des migraines et je dors peu à cause des cauchemars, mais dans l’ensemble je ressemble déjà plus à quelque chose. Je sais marcher, un peu... mais je ne peux pas encore voyager. Ma sœur me manque énormément. J’ai pu lui envoyer une lettre, pour la rassurer, mais j’ai hâte de la revoir.

En attendant, je m’occupe en essayant de retrouver la personne qui m’a sauvé la vie. Cela n’a pas été simple d’obtenir des informations à son sujet. C’est que tout s’est un peu enchainé, après la bataille... Et je suis resté longtemps en convalescence... Beaucoup de combattants sont repartit, et j’ai eu peur pendant un moment qu’il en soit de même pour la personne qui m’a aidé. Pourtant, à force de persévérance, j’ai enfin pu obtenir un nom : Zhang Xiaoyan.  

Il m’a fallu encore un peu de temps pour apprendre qu’il était toujours à Omashu et réussir à le localiser. Cela a au moins eu l’avantage de m’occuper l’esprit...

D’un pas peu assurer, je me faufile dans les rues bondées vers mon objectif : une auberge non loin du centre des blessés. Savoir qu’il se trouvait là depuis le début m’a fait grincer des dents, nous étions si proches sans que je ne le sache...

J’ai quitté le centre voilà seulement quelques jours pour loger chez un habitant qui m’héberge gracieusement le temps que je puisse reprendre la route. En contrepartie, je cuisine pour l’homme et sa famille et prend soin des enfants pendant que les parents travaillent. C’est provisoire, mais au moins je me sens utiles, pour une fois... et surtout je n’ai pas l’impression de profiter d’eux...

Il y a du monde, à l'auberge. Je demande après l’homme que cherche en espérant qu'il soit bien présent. Nous sommes début de journée, il pourrait très bien être ailleurs...
Heureusement, on m'indique une table prêt d'une fenêtre. Prenant une grande inspiration, je m’approche de l’homme en boitillant.

- Zhang Xiaoyan ? Je m’appelle Shi Xiaoliang... peut-être me reconnaissez-vous...  

Je fais une pause, le regard porté sur son bras blessé, puis reprend en relevant les yeux.

- Vous... m’avez sauvé, durant la bataille...

S’il s’agit bien de lui...

Résumé des blessures :
- Brûlé à la jambe gauche : reste un boitillement et un tiraillement dans la jambe.
- Diverses brûlures légères désormais soignées : quelques marques laissées sur le corps.
- Une commotion cérébrale désormais soignée mais dont il reste des migraines fréquentes.

Quand tu étais petit, le nom d’Omashu te remplissait d’admiration. Tu rêvais d’aller découvrir la Cité; d’enfin pouvoir passer ses murs puissants, et de découvrir toutes les merveilles qu’elle pouvait t’offrir. A l’époque, tu avais beau savoir que la vraie capitale du Royaume de la Terre était Ba Sing Se, c’était Omashu qui te semblait le centre du monde. Plus intéressante, plus approchable pour toi aussi. Cela n’aurait pas représenté tant de temps de voyage. Mais le travail de ton père le conduisait à rester dans ton village - toute ta famille y était, vous y aviez tout ce dont vous aviez besoin. Alors Omashu était restée un rêve encore inaccessible. Tu n’as pu y aller que bien plus tard, lorsque des missions communes entre la Tour et la Forteresse t’ont amené à visiter les environs de la ville - et parfois tu t’y es arrêté. La Cité dépassait tout ce que tu avais pu t’imaginer, enfant ; elle allait au-delà de tes rêves les plus fous, même si le système postal t’a donné quelques sueurs froides - trop rapide, trop dangereux, même si visiblement terriblement efficace.

Et maintenant, tu donnerais presque tout pour t’en aller. Aussi vaste que soit la ville, tu as l’impression d’être un animal qui ne fait que tourner dans sa cage. Tu regrettes la Tour, sa beauté, son élégance, et les montagnes autour. Tu aimes voyager, c’est indéniable, mais te retrouver coincé à un endroit dans de telles conditions est..tu ne saurais même pas le dire. Tu n’aimes pas ; pire encore, tu détestes, et te dire que c’est la meilleure solution n’arrange pas les choses. Tu as l’impression de gérer mille choses à la fois ; et tu passes tes journées à t’inquiéter. Qu’adviendra-t-il de la Tour ? De tous les élèves sans maître, des maîtres sans élèves ? Tu essayes de faire au mieux, mais ce n’est pas assez, et cela ne sera jamais assez.

Et il y a bien pire. Il y a tes enfants, blessés physiquement et moralement. Tu n’as pas besoin de t’étendre sur le sujet ; toute l’horreur de la choses est déjà bien comprise dans cette pensée . Tes enfants sont blessés, et celui qui n’appellerait pas Zhihao ta fille risquerait de le regretter. Élève, oui, mais plus que ça.

Tu es devenu encore plus taciturne. Tu t’en veux, et tu te sens impuissant, et coupable. A côté de ça, ta blessure au bras n’est rien, rien du tout ; cela ne t’empêche pas de faire ce qui doit l’être. Mais tes enfants….

Ton regard se pose sur ta tasse de thé, et tu la regardes comme si tu avais envie de t’y noyer. Les vestiges de ton petit déjeuner demeurent sur la table, à moitié touchés ; rien à dire, rien à faire, tu n’arrives pas à y trouver de l’intérêt. Ton estomac est trop noué.

Regarder par la fenêtre est mille fois plus intéressant.

Mais ce moment de calme -d’abattement qui ne s’assume pas – est brutalement interrompu par la voix d’un homme qui s’adresse à toi. Tu lui jettes un coup d’oeil, et il te semble familier. Ce n’est pas un client de l’auberge, mais pourtant tu es persuadé de l’avoir vu il n’y a pas si longtemps. Tu fronces les sourcils, tout à ta réflexion.

“..Oh.” C’est tout ce que tu peux dire. “ Effectivement, je me rappelle de vous. Je suis heureux de voir que vous allez mieux. ” Mieux, plutôt que bien, parce qu’il a l’air de toute évidence blessé, et que vu l’état dans lequel tu l’as confié aux guérisseurs..Voilà. Et puis, après une telle bataille que tu prends personnellement comme un échec, est-ce qu’on peut réellement aller bien? La question mérite d’être posée.Je suis navré de n'avoir pu vous rendre visite auparavant, mais mes obligations avaient la priorité. Par exemple : tes enfants, ou la Tour dont tu portes les couleurs. Toujours. Avec fierté.

“Je vous en prie,asseyez-vous.” Autant qu’il ne reste pas debout, blessé comme il l’a été - et puis même, tu te sentirais mal à l’aise à l’idée d’être le seul assis. Cela ne te semble pas..équitable.

   

My saviour  

6ème mois de la 53e année de Ri Wu - Quelques semaines après la bataille au Nord d’Omashu.

L’homme à l’air... fatigué... Il me reconnait sans trop de mal, et s’excuse de ne pas être venu me voir. Je chasse ses inquiétudes d’un mouvement de la main.

- Oh il n’y aucun mal ! Je suis juste heureux d’avoir pu, moi, vous trouver.  

Il me propose de m’asseoir, et je le salue légèrement avant d’obtempérer. J’ai appris, après ma rencontre avec Matsumoto Seiya. J’ai reconnu les couleurs que porte l’homme, même si je ne sais rien de plus que les noms et les couleurs concernant les sectes... Mais c’est déjà un mieux par rapport à avant...

Un peu mal à l’aise, je reste droit sur ma chaise, mais je reprends rapidement la parole.

- Je vous dois la vie... Et je tenais à vous remercier personnellement pour ça. J’ai désormais une dette éternelle envers vous, et si je peux vous aider de quelque façon que ce soit, et ce à n’importe quel moment, je suis à votre disposition.

Je fais une courte pause avant de reprendre.

- Je ne suis pas un grand combattant... comme vous avez pu le constater par vous-même... mais j’ai d’autres compétences... et surtout je connais du monde un peu partout dans Ya Tai. Sachez donc que vous avez désormais un allier si un jour vous en avez besoin...

Je me sens un peu idiot. Cet homme est bien plus expérimenté que moi à tous les niveaux, cela se voit... Mais je ne serais plus là si lui ne l’avait pas été pour moi... alors il me semble normale de lui rendre la pareil de quelque façon que ce soit...  

Mon regard se pose à nouveau sur son bras, et je serre un peu les poings.

- Je vais mieux oui... Et vous, comment allez-vous ?

Résumé des blessures :
- Brûlé à la jambe gauche : reste un boitillement et un tiraillement dans la jambe.  
- Diverses brûlures légères désormais soignées : quelques marques laissées sur le corps.
- Une commotion cérébrale désormais soignée mais dont il reste des migraines fréquentes.

Tu peux être honnête avec toi-même ; tu ne t’attendais pas à ce que l’homme que tu as sauvé te retrouve. Ou même, prenne la peine de te chercher pour te remercier. Cela te touche, d’un certain côté ; tu es heureux de voir que le concept de gratitude ne soit pas oublié, en ces temps troublés. Mais de l’autre..De l’autre tu as autre chose à penser, autre chose à faire, que t’intéresser à cet homme et passer plus de temps avec lui que strictement nécessaire. Tes enfants sont blessés. Ta Tour est blessée, d’une certaine façon. Tu as tant à faire.Voir les autres disciples de la Tour, les encourager s’ils sont déprimés, leur apporter tes condoléances s’ils ont perdu des proches. Et..essayer de ne pas oublier de dormir ou de t’alimenter, au passage. Même si le sommeil te fuit, tant tu t’inquiètes. Pour toi cette bataille reste une défaite, peu importe ce que les annonces officielles disent ; tu t’inquiètes des retombées, des prochains mouvements de la Nation du Feu, si des mesures ne seront pas prises vis-à-vis d’Omashu ; tu te demandes si tu ne devrais pas immédiatement rapatrier tout ce qu’Omashu compte encore de disciples de la Tour au Temple de l’Air de l’Est. C’est dur, de gérer tout cela. Tu n’as pas le temps - tu n’as le temps pour rien. Et pourtant tu ne peux pas te montrer grossier avec cet homme - justement parce qu’il a fait de gros efforts pour te chercher, juste pour te remercier. Tu as un sourire bref à sa réponse.

“Je ne vous ai pas sauvé la vie pour que vous ayez une dette envers moi. Je l’ai fait parce que c’était mon devoir en tant que cultivateur, et que je n’aurais pu me regarder dans la glace si je n’avais pas au moins essayé de m’interposer. Laisser ce qui me semblait être un civil face à des soldats de la Nation du Feu..Non, cela aurait été honteux.” Peut-être que tu parais très protocolaire ; tant pis. Tu as appris une certaine étiquette, en devenant cultivateur. Mais pourtant, tu restes honnête. Tu as emprunté cette voie - La Voie de la spiritualité - pour pouvoir venir en aide à ton prochain. Quel homme serais-tu, si tu ne suivais pas ce principe en toutes circonstances ? Un menteur, un parjure - une honte. “Cependant, j’apprécie ce sentiment.” Des alliés dans tout Ya Tai? Un espion ? Non, il a l’air trop..enfin, pas assez dangereux. Enfin, peut-être pas. Mais en tout cas, un guerrier se comporterait avec plus de confiance en lui. “Quelle...profession exercez-vous, pour connaître tant de gens ?”

Mais voilà qu’il te demande comment toi tu vas, et tu te sens pris de court. Tu es surpris que quelqu’un s’inquiète sincèrement pour toi, et pourtant, tu ne peux pas tout dire. La Tour doit paraître toujours forte, inébranlable - et toi aussi.

“Aussi bien que possible, vu les circonstances. Mon bras guérit assez bien. C'est déjà mieux que la plupart d’entre nous." Tout le monde n’a pas eu cette chance. Yeling par exemple. Et Zhihao. Et tous tes frères et sœurs martiaux de la Tour, et tes amis de la Forteresse. Voilà pourquoi tu ne pourras jamais qualifier la bataille d’Omashu de victoire. Cela serait déplacé. Une victoire se célèbre, mais comment pourrais-tu faire la fête avec tous les disparus ? La décence te l’interdit.

My saviour

6ème mois de la 53e année de Ri Wu - Quelques semaines après la bataille au Nord d’Omashu.

Xiaoyan me rétorque que je n’ai pas à avoir de dette envers lui. Ce n’était pas le but de son sauvetage. Je baisse les yeux lorsqu’il parle de civil. Oui, j’ai été bien idiot de me lancer dans cette bataille...

Je pince brièvement les lèvres avant de reprendre.

- Même si ce n’était le but, cela ne change rien. C’est ma façon de vous remercier...

Je relève les yeux lorsqu’il me demande ce que j’exerce comme métier. Un fin sourire apparait alors sur mes lèvres.

- Je suis marchand. Ma famille voyage dans tous Ya Tai et parfois même au-delà pour acheter et vendre toute sorte de chose... Personnellement je suis désormais basé à Ba Sing Se avec ma petite sœur, mais nous avons été nomade jusqu’il y a peu, et ma famille l’est toujours.

Lorsque je lui demande comment il va, il semble surpris, mais il me répond. Je baisse à nouveau les yeux face à ses mots.

- Tellement de morts et de blessés... Cette guerre ne finira-t-elle donc jamais ?

Je suis resté en dehors de ça depuis tellement longtemps que la réalité m’a pris de plein fouet... Si participer à cette bataille était la pire idée du monde, cela m’a au moins permis de me rendre compte à quel point les choses vont loin... Jusqu’à maintenant, je n’avais vu la guerre que de loin, j’en avais juste vu quelques dégâts mais j’avais toujours été protégé par ma famille...

Désormais, je ne peux plus me voiler la face... la guerre fait des ravages, c’est un fait...

J’hésites un instant à lui demander s’il a perdu des proches mais cette question me semble déplacée... Il semble ailleurs, préoccupé... et je ne sais pas trop quoi faire...

Mon regard se pose sur le repas à peine touché sur la table. Je relève alors les yeux sur l’homme et fini par reprendre.

- Je suis désolé... pour votre blessure, et pour vos pertes...

Je ne demande pas, j’affirme... car tout me fait dire qu’il a été bien plus que touché par cette bataille...

Résumé des blessures:

Avant, avant - peut-être que dans tes jeunes années tu te serais rengorgé si quelqu’un te remerciait ainsi de t’avoir sauvé. Peut-être, lorsque tu étais plus naïf et moins sage, ; tu ne peux pas le savoir, faute d’avoir participé à un tel conflit armé à une période aussi formatrice. Ou peut-être pas. Si tu es venu à la Tour, c’était à cause de ton côté redresseur de tords - cette part de toi qui te criait “je veux aider les autres.”  Tout ce que tu sais, c’est que maintenant, cela te met..presque mal à l’aise ? Tu n’as pas fait cela pour obtenir des louanges, ou de la reconnaissance, ou quoi que ce soit de ce genre. Tu l’as fait parce qu’un civil était dans une situation fâcheuse, juste devant tes yeux. N’en déplaise à Shi Xiaoliang, tu n’as rien d’un héros, tu es un cultivateur animé par son devoir. Tu ne veux pas que l’on ait de dette envers toi. Une dette est quelque chose qui lie deux personnes, de façon déséquilibrée - et c’est quelque chose que tu refuses. Tu ne veux pas que ton interlocuteur te voie de cette façon. Et pourtant, il s’obstine. Tu as un certain côté buté, tu l’admets sans problème, mais lui te semble battre tous les records. Il ne lâche pas l’affaire, au contraire - il renchérit, disant que cette dette serait une façon de te remercier. Par tous les esprits, il aurait pu te payer un repas ; tu en aurais été heureux, inutile d’en faire toute une affaire ! Il n’y as pas besoin de se torturer l’esprit pour quelque chose qui relève de ta fonction, de ton sacerdoce même, de ta vocation !

“..Effectivement. Être marchand permet d’être en contact avec de nombreuses personnes.” Après tu ne connais pas la qualité de ses produits, mais disons qu’au minimum, Shi Xiaoliang peut être en contact avec différentes classes sociales. “Vous venez de loin, si vous vous êtes établi à Ba Sing Se..” L’autre bout du Royaume, quand même, à se demander comment il s’est retrouvé sur le champ de bataille d’Omashu. “Mais si vous voulez réellement m’aider ; n’hésitez pas à encourager à rejoindre la Tour aux Mille Vents, si d'aventures vous voyagez dans le Sud ou l'Est du Royaume.”   Que dire de plus ? Vos rangs se sont éclaircis, vous avez perdu des disciples, des maîtres, des grands maîtres ; dans les années à venir, vous aurez besoin de tous les apprentis que vous pourrez trouver.

“A qui le demandez-vous..” souffles-tu. Question rhétorique. A cause de cette guerre, les esprits sont perturbés, ils s’agitent, commettent des méfaits, et qui doit les apaiser ? La Tour, entre autres. Autrement dit, toi. Et maintenant, la situation est telle que la Tour doit affronter les soldats de la Nation du Feu dans des batailles plus ou moins rangées. Tout ceci ne te semble pas extrêmement normal. En théorie..en théorie, un cultivateur n’a pas à se mêler de conflit armé. Enfin, peut-être contre la “secte” du Temple du Soleil Pourpre parce que leurs enseignements vont contre tout ce en quoi tu crois, mais c’est bien tout.

“Merci.” Ta réponse est presque mécanique, mais ton regard se pose sur la table. “Mon bras, ce n’est rien - une légère gêne, tout au plus. Mes enfants blessés, en revanche..” Tu ne sais même pas trop pourquoi tu t’épanches ainsi. Peut-être que c’est le moment où tu commences à craquer, pour te confier ainsi à un quasi-inconnu. Ou peut-être est-ce parce que c’est un quasi-inconnu qu’il est plus simple pour toi de te confier. Tu ne saurais le dire.

My saviour

6ème mois de la 53e année de Ri Wu - Quelques semaines après la bataille au Nord d’Omashu.  

L’homme fait remarquer que je viens de loin si je vis à Ba Sing Se. En effet, je n’aurai jamais dû me trouver ici...  

Je baisse de nouveau les yeux pour répondre d’une voix peu assurée.

- Un... souci personnel m’a fait rejoindre mes parents un moment. J’ai un peu voyagé avec eux, mais je ne vais plus tarder à rejoindre ma sœur... Elle me manque...

Et j’ai besoin de penser un peu mes blessures... et de m’entrainer...

Xiaoyan fini par accepter mon aide, d’une certaine façon, en me demandant de renvoyer des gens vers la Tour aux Mille Vents. Je hoche simplement la tête avec un petit sourire timide en signe d’acceptation. Cette guerre est une vraie hécatombe... Comment ai-je pu rester aussi longtemps loin de tout ça ?  

L’homme semble aussi attristé que moi face à tout ça. A mes derniers mots, il me remercie et affirme que, lui, ça va, mais que c’est autre chose pour ses enfants... Il a donc bien été touché bien plus qu’une simple blessure physique...

Je ne sais pas comment je réagirais si ma famille était blessée... particulièrement ma petite sœur...

Je garde le silence une seconde avant de reprendre, compatissant.

- Je vous comprend... Les blessures de nos proches sont souvent bien plus douloureuse que nos propres blessures... S’il devait arriver quoi que ce soit à mes parents ou à ma sœur, je ne le supporterais probablement pas...  

Alors que mes blessures... je n’ai que ce que je mérite pour avoir voulus jouer les héros dans une bataille bien trop grande pour moi, pauvre petit marchand qui ne sait ni se battre, ni maitriser correctement son élément...

Sentant mon esprit dériver vers de sombres pensées, je m’efforce de me recentrer et reprend sur un sujet plus léger.

- Pouvez-vous me parler un peu de la Tour aux Mille Vents ? Que je puisse la “vendre” à d’éventuels disciples.

C’est la base dans le métier : savoir de quoi on parle...

Bien sûr il est possible de vendre ce qu’on ne connait pas, mais je préfère éviter, car pour moi cela ressemble fort à du charlatanisme...  

Et puis si je dois renvoyer des gens vers la Tour, autant savoir comment leur donner envie...

Résumé des blessures:

Il n’aurait jamais du se trouver sur le champ de bataille, te dis-tu, un peu dépité. Tu ne comprenais déjà pas vraiment pendant la bataille ce qu’il faisait là, tu comprends encore moins maintenant. Comment un simple civil a-t-il pu avoir l’idée de combattre comme ça ? Ne s’était-il pas dit qu’il risquait d’être blessé ou pire, une victime collatérale de cet affrontement ? Tu es d’accord pour dire qu’il faut accueillir les gens de bonne volonté s’ils veulent se joindre à la lutte contre la Nation du Feu, mais pas sur un champ de bataille. Qu’il relaye des informations, approvisionne les troupes, cela aurait été très bien ; mais qu’il se mêle aux combattants aguerris alors que de toute évidence, c’est un novice, voilà qui était ..Presque stupide ? Ou très courageux, mais pas très sage. Au final c’est toi qui as du lui sauver la mise. Au moins..vu son expression, il a l’air de regretter de s’être trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment.

“Vous devriez rejoindre votre soeur. Profitez de votre famille tant qu’elle est là, avec vous.”

Il a la chance d’avoir quelqu’un qui l’attend ; il ne devrait pas aller la gâcher pour aller courir le guilledou, et se retrouver dans des ennuis plus gros que lui. Peut-être que tu es dur avec lui. Comme avec tout le monde, surtout toi. Mais c’est quand même, parce qu’il est venu combattre que tu as du aller le sauver, et qu’indirectement, tu as été blessé. Chaque personne devrait contribuer à la mesure de ses capacités, et Shi Xiaoliang a surestimé les siennes, malheureusement..

Tu hoches la tête aux mots qu’il ajoute ensuite.

“Voir mes enfants blessés m’est intolérable.” C’est dire peu et beaucoup, en même temps, malgré la concision de ta phrase; et surtout, c’est peu dire. Tu es effondré, tu t’auto-flagelles mentalement chaque matin que les esprits font, depuis la fin de la bataille d’Omashu. Tu n’aurais pas du les emmener avec toi, tu aurais du mieux les protéger, tu es arrivé trop tard, et les voilà ; Zhihao est marquée mentalement, Yeling physiquement, et tu t’en veux. Mais tu ne peux pas changer le passé, malheureusement. Tu te dirais bien qu’il est inutile de pleurer sur le lait renversé, mais lorsque tu vois tes enfants aussi atteints, il est difficile d’avancer réellement.

Cependant, tu esquisses un sourire lorsque Shi Xiaoliang te demande de présenter la Tour. Ah ! Vaste sujet, dont tu pourrais parler pendant des heures - mais un cours complet sur ce qu’est la Tour risque d’assommer plus ton interlocuteur qu’autre chose. Tu dois être..bref, et surtout efficace.

“La Tour est née de la volonté de Hu Sonam, un cultivateur de la Forteresse du Pic Ecarlate de venir en aide aux Nomades de l’Air. Lui-même était le fils d’une Nomade.” expliques-tu. “Il est parvenu à concilier les valeurs de la Forteresse - notamment la Justice et le sens du devoir- et ses enseignements avec les pratiques des Nomades. Ainsi, si comme la Forteresse nous pratiquons la cultivation musicale, nous utilisons les instruments des Nomades de l’Air. Moi-même, je joue du paixiao. Nous avons également développé nos propres techniques, comme le vol sur épée”. Rien ne vaut un exemple. “Nos méthodes sont aussi moins..extrêmes, nous préférons apaiser plutôt qu’exterminer les créatures et esprits qui causent des troubles. Ce qui ne veut pas dire que nous sommes inoffensifs ; lorsqu’il faut trancher dans le vif, nous le faisons. Simplement, nous essayons d’abord une autre voie. “ La diplomatie avant la violence, en quelque sorte. “ Et nous regrettons terriblement la disparition de l’Avatar, et nous essayons tant bien que mal de jouer un rôle approchant. C’est pour cela, aussi, que nous soutenons les nomades de notre mieux.”

Que pourrais-tu encore ajouter ? C’est compliqué à dire. “Nous privilégions ainsi des disciples ayant une forte moralité ainsi qu’une grande discipline - ou du moins, ceux qui ont assez de volonté pour s’imposer une grande discipline. Nous sommes l’acier recouvert de velours. Toutefois..” Et là, tu regardes un instant ton interlocuteur. “N’allez pas essayer de recruter des disciples en dehors de l’Est, voire un peu du Sud du Royaume de la Terre. Il est assez impoli d’empiéter sur les terrains des autres sectes. Toutefois, nous préférons de jeunes disciples, et au-delà de l’âge de 25 ans il est plus compliqué d’apprendre à cultiver selon nos méthodes. Ah, je devrais probablement ajouter que nous suivons le même régime alimentaire que les Nomades de l’Air, c’est-à-dire végétarien..”

Tu t’arrêtes un instant, pour boire une gorgée de thé. Cela fait bien longtemps que tu n’as pas aligné autant de phrases à la suite.

“Connaissez-vous l’organisation des sectes, ou avez-vous besoin que je vous éclaire à ce sujet ?” demandes-tu ensuite. On ne sait jamais. Parfois, les sectes restaient un peu mystérieuses pour le grand public.

My saviour

6ème mois de la 53e année de Ri Wu - Quelques semaines après la bataille au Nord d’Omashu.  

Xiaoyan confirme qu’il faudrait que je rejoigne ma sœur, que je devrais profiter de ma famille tant qu’ils sont là. Je sens... comme un reproche dans sa voix... Ou en tout cas quelque chose qui me serre la gorge. Je crois que je m’en voudrais toute ma vie d’avoir été autant un boulet...

Lorsque j’affirme que les blessures de nos proches sont souvent pire que les nôtres, il confirme. Il semble réellement marqué par ce qui s’est passé...

Heureusement, lorsque j’aborde le sujet de la tour, il semble se détendre légèrement et va même jusqu’à sourire. Un sourire léger, certes, mais un sourire tout de même...

Il se lance alors dans une présentation de sa secte sans se faire prier. Je l’écoute avec attention, heureux d’en apprendre plus sur un sujet que je connais à peine, et seulement depuis peu...

Mon expression montre mon intérêt. Il sait de quoi il parle, et il me donnerait presqu’envie de rejoindre la secte moi-même, si je le pouvais...

Je hoche la tête en signe de compréhension de ses paroles. Je ne m’attendais pas à ce qu’une secte demande autant de... discipline... et suive autant de règles... On dirait presqu’un monde à part entière...

- Très bien. Je ferai au mieux pour vous trouver des disciples dignes de la Tour et de ses principes.

L’homme me demande alors si je connais l’organisation des sectes. J’affiches un sourire contrit avant de répondre.

- Et bien... Je ne connaissais rien des sectes jusqu’à il y a peu... Donc je ne sais rien de leurs organisations non... Mais je serai ravi d’en apprendre plus sur le sujet.  

Mon sourire se fait sincère alors que je me redresse sur ma chaise, avide d’apprentissage. Il est temps que je sorte un peu de ma bulle... Malgré mes nombreux voyages, je ne connais rien du monde, s’en est presque pitoyable...  

Résumé des blessures:

Au moins, parler de la Tour a pour mérite de te faire penser à autre chose qu’à tes enfants blessés,songes-tu. Tu aimes parler de la Tour, de cultivation, avec un public qui soit un minimum réceptif, et lorsque ton auditeur a besoin d’explications tu les donnes volontiers. Ton côté professeur avant tout, sans doute. Mais c’est un exercice intéressant que d’expliquer de façon accessible pour un néophyte ce que toi tu connais et as intégré depuis si longtemps, avec pour contrainte de rendre ça intéressant pour un public, suffisamment pour que rejoindre la Tour soit une révélation, une vocation. Pour toi qui te juges objectivement assez ennuyeux, c’est..compliqué. Mais tu essaies, tu mets toute ta passion pour ta secte dans tes paroles. Et..visiblement, ça marche ? Shi Xiaoliang a l’air..plutôt intéressé parce que tu dis. C’est plutôt bon signe. Maintenant, tu ne peux qu’espérer qu’il soit capable de restituer ce que tu lui as expliqué..

“Je vous remercie” , t’inclines-tu brièvement. Peut-être est-ce de trop comme c’est lui qui t’as demandé ce qu’il pouvait faire pour te remercier de lui avoir sauvé la vie, mais c’est ainsi ; tu es comme ça, protocolaire à l’extrême. Tu as été éduqué avec la plus grande rigueur et discipline après tout, et l’idée de ne pas témoigner ta gratitude te fait horreur. Ton maître y a suffisamment veillé. Ton maître..bonne transition avec ton interrogation suivante, sur l’organisation des sectes ; et ton interlocuteur te répond qu’il n’y connaît rien sur ce sujet. Et bien, le pauvre devra absorber une vague d’explications supplémentaires…En espérant que tu ne l’ennuies pas trop..

"Pour résumer très simplement, une secte est comme une grande famille. Une famille martiale, dans notre cas. Un Maître- ou un Grand Maitre- est comme un père pour les disciples qu’il forme -mais un disciple ne peut avoir qu’un seul Maître attitré, même si en certaines occasions il peut être amené à travailler avec un autre.  Entre disciples de la même génération, on s’appelle frère et soeur martiaux. Un ou une disciple  de notre génération arrivé avant soi à la secte sera notre grand frère ou notre grande sœur martiale ; un ou une disciple de notre génération arrivé après sera notre petit frère ou notre petite soeur martiale. L’âge n’a aucune importance - ce qui compte est l’ancienneté. Ces liens..sont extrêmement importants. Enfin, pour diriger la secte, il y a le Chef de secte -  à la Tour, Hu Sonam..” Et tu laisses clairement sous-entendre que tu lui portes le plus grand respect. Rien que parce qu’il a fondé la Tour et a ainsi donné un sens à ta vie.
"Si vous avez d'autres questions, n'hésitez pas - je me ferai un plaisir d'y répondre" , ajoutes-tu enfin.

“Connaissiez-vous les sectes avant la bataille?”  demandes-tu, un peu curieux. “Peut-être la Forteresse du Pic Ecarlate ou le Jardin des Parfums Dissimulés, puisque vous vivez au Royaume ?”  Tu as tenté de dissimuler la méfiance que cette dernière secte t’inspire parce que critiquer d’autres cultivateurs ne se fait pas, mais bon. Tu n’as jamais prétendu être un bon acteur. Cependant, tu es sûr qu’il ne connaissait pas vraiment la Tour. Il ne t’aurait pas demandé de faire un tel exposé dessus sinon.