[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Cela ne fait que quelques jours que je suis rentrée à Hikyo, quelques jours après ce qu'il s'est passé au Royaume de la Terre, au nord de la ville d'Omashu. Et si mes blessures ne sont pas aussi impressionnantes que celles que j'ai pu avoir par le passé, la fois où Takezo a tant paniqué lui-même qu'il était allé quérir les services de Kaori pour me soigner, je sens bien que mes parents sont presque autant inquiets pour moi depuis mon retour de cette campagne qu'à l'époque de mon importante blessure. Sans doute parce que depuis mon retour, je suis plongée dans un mutisme presque complet. Que je ne suis plus que l'ombre de moi-même, que je dors mal si tant est que j'arrive à dormir la nuit. Non, mes blessures suite à ce qu'on appelle déjà "la bataille du Nord d'Omashu" sont bien plus mentales que physiques et ce, malgré les bandages que je peux quand même arborer depuis mon retour. Mais à quoi bon parler ? Surtout de ça ? Mon père, en Général du Conseil des Généraux de notre Seigneur du Feu, a déjà eu accès aux rapports. Ma mère… Ma mère ne veut sans doute rien savoir et je ne peux que la comprendre. Mon frère… Tss, il ne pourrait pas comprendre, lui qui ne jure que par les chiffres et les calculs comptables. Quant à ma sœur, elle pourrait encore moins comprendre que Takezo tant elle est… Ce qu'elle est. Personne ne trouve grâce à mes yeux et même ceux qui pourrait l'avoir et bien… Ai-je vraiment besoin de reparler de ça avec eux ?

Et depuis ces quelques jours depuis mon retour à Hikyo, j'ai aussi pris l'habitude de m'isoler et de rester une grande partie de la journée seule dans mon coin. Au moins, personne n'est tentée de venir me parler dans ces moments-là, alors que je partage mon temps entre un peu de méditation ou juste prendre le temps d'observer ce qu'il se passe dans le jardin quand je m'isole dans cette partie de la demeure de mes parents, ou dans une pièce qui a vu dessus, comme c'est le cas en ce moment. A vrai dire, je me dis que ça doit être aussi passive et posée, moi que mon père a toujours habituée à bouger, à me montrer énergique et à trouver quelque chose à faire, qui doit autant inquiéter mon entourage à propos de mon état… Mais à vrai dire, je n'en ai pas grand-chose à faire, essayant simplement de prendre du temps pour moi et mes blessures, physiques comme mentales.

Et je suis d'ailleurs toute à mes pensées, le regard dans le vague même si dirigé vers le jardin visible depuis le panneau en bois y donnant accès ouvert, quand une voix féminine se fait entendre dans mon dos. Si je le fais déjà à la voix, je reconnais également Juan à sa façon de m'appeler Dame Akane. Encore et toujours la seule à s'acharner à vouloir m'appeler ainsi. Mais je n'ai pas le gout de me battre pour quelque chose d'aussi futile, pas aujourd'hui, alors je garde simplement le silence en tournant le regard vers elle. Je ne lui adresse qu'un léger hochement de tête en guise de salutation pour répondre à la sienne mais également lui faire comprendre qu'elle peut entrer dans la pièce si elle le souhaite. Le tout d'un seul geste, espérant qu'elle comprenne les deux réponses que je donne dans ce hochement de tête. Cela semble être le cas, pour l'invitation à se joindre à moi en tout cas, car elle ne tarde pas à le faire. Et à en venir à me proposer d'utiliser les cartes en bois peintes qu'elle a utilisé pour aider à ses enfants, mes neveux et nièces, à parler.

- Merci ma chère belle-sœur, mais cela ne sera pas utile.

Lui réponds-je simplement et sans la moindre animosité. La preuve, je ne repousse même pas les cartes qu'elle a sorti entre nous, me contentant de les observer en silence. Je n'ai pas la fibre artistique de ma sœur cadette mais je dois reconnaître qu'il s'agit là d'un beau travail. Du moins, à mes yeux de néophyte et peu connaisseuse dans ce domaine.

- Je crains n'avoir pas grand-chose à dire. Verbalement ou avec vos cartes.

Ajoutes-je assez rapidement tout en redressant mon regard vers l'épouse de mon frère. Comme depuis son mariage avec Takezo, je n'ai rien contre Juan et ce n'est donc nullement contre elle que je lui fais comprendre que je ne suis pas vraiment d'humeur aux grands discours. A l'image de ce qu'on semble lui avoir dit à mon sujet depuis mon retour vu ses propos quelques instants plus tôt. Mais au moins, je reste d'humeur égale et ne m'énerve pas d'une manière ou d'un autre. Car soyons honnêtes, dans d'autres circonstances, face à d'autres personnes, les cartes en bois auraient pu finir en morceaux de charbon ou volant à travers la pièce…