Le Sud du Royaume de la Terre. Avec le temps et tes (très) nombreux voyages, tu as fini par bien connaître cette région, à l’apprécier même. Même si tu ne viens,jamais ô jamais, juste pour le plaisir. Généralement, tu y viens pour des missions ou des chasses ; parfois pour des voyages à la Forteresse. En ces occasions tu te retrouves flanqué par tes disciples, suivi par eux comme des canards-tortues suivant leur mère, en un joyeux chaos plus ou moins organisé. Tu n’interviens pas beaucoup - seulement quand ça dégénère trop à ton goût. Ou qu’un ou une d’entre eux semble bien parti pour se retrouver blessé. Tu es de l’avis que chaque expérience peut être une leçon et qu’il faut être conscient des conséquences de ses actes, mais il y a des limites.Tu ne laisseras pas tes disciples être blessés pour rien. Mais tu es seul, aujourdh’ui. La petite ville côtière avait besoin des services de la Tour, rien de bien important. Tu n’as pas pris de disciples avec toi. Exceptionnellement tu avais envie d’être un peu seul. Cela arrive, parfois - rarement. D’habitude tu préfères partager ton savoir avec tes disciples. Mais aujourd'hui, non.

Tu as réglé rapidement le problème, comme à ton habitude - ce n’était rien de bien dangereux, juste un kappa causant quelques soucis. La routine, presque. Mais tu connais la marche à suivre pour le faire partir sans trop de dégâts. Être respectueux, lui donner de la nourriture ; c’était réglé en moins de temps pour ne faut pour le dire. Tant mieux. Face à une bestiole de type huli jing, tu aurais un peu plus grogné - elles ne font définitivement pas partie des missions les plus agréables du métier, quand bien même tu éprouves toujours la même passion à venir en aide à autrui. Toujours est-il, maintenant tu prends un peu de repos dans une auberge, histoire de prendre un bon repas chaud. Et végétarien, selon les règles de la Tour qui reprennent celles des Nomades de l’Air. Surtout.

Il était encore tôt dans la soirée, l’auberge n’était pas encore particulièrement pleine. Tant mieux, d’un côté. Un peu de silence fait du bien, parfois - même si tu n’aimes pas particulièrement l’obséquiosité du serveur, qui a bien repéré tes robes de cultivateurs aux couleurs de la Tour. Il a même essayé de te faire la conversation, mais fidèle à toi-même tu restes succinct et efficace. Tu n’es pas particulièrement d’humeur à bavarder après tout.

Mais alors que tu t’apprêtes à prendre une nouvelle bouchée, voilà que ton attention est attirée par le bruit de la porte qui s'ouvre -ah, une cliente qui vient d’entrer. Une cliente qui te paraît bien familière.

Son voyage se fait lent, plus lent que si elle était en mission. Rajni n'est pas du genre à passer par quatre chemins, surtout pas lorsqu'elle a un but à accomplir. Elle n'aime pas quand cela traine, quand cela prend du temps. Là, elle ne change pas vraiment de ses habitudes malgré la lenteur de son avancée. Elle n'est pas en mission. Elle aurait préféré en fait. Pour la première fois depuis qu'elle a quitté le temple de l'Air du Sud, elle va y retourner. Elle a bien correspondu avec sa mère depuis qu'elle a quitté, de façon toujours aléatoire, mais elle n'y est jamais retournée, trop inquiète. Trop nerveuse. Trop en colère. Colère qui est moins forte, mais toujours présente. Elle ne pense pas qu'elle puisse s'en départir. Comment pourrait-elle s'en départir alors que la nation du feu continue de vouloir étendre son pouvoir même si les autres nations ne veulent rien savoir. Bref, plein de raisons pour lesquelles elle n'est pas retournée au temple. Plein de raisons pour lesquelles elle va le faire le lendemain, elle ne se sent pas si prête que cela à retrouver son chez elle et surtout sa mère. Elle est moins en colère que lorsqu'elle est partie, mais elle la sent toujours. Elle ne sait pas si elle est assez forte pour y retourner. Elle espère que la nuit va lui porter conseil. Lui faire rebrousser chemin ou lui porter courage... c'est une assez bonne question. Elle ne sait pas ce qu'elle veut exactement. Elle préfère affronter des soldats de la nation du feu que de revoir les montagnes et des visages connus.

Elle se dirige vers une auberge afin de pouvoir y dormir. Une fois à l'intérieur, elle commence par faire un tour visuel vite fait des clients pour voir s'il n'y aurait pas des soldats de la nation du feu par hasard qu'elle pourrait reconnaître. Il n'y en a pas, mais il y a quelqu'un qu'elle reconnaît. Xiaoyan. Elle déteste cela. Elle va se dépêcher et... au regard qu'il fait, il l'a reconnu. Elle retient un soupir et se dirige vers lui, avec un hochement de tête dans sa direction. « Xiaoyan. » fait-elle, une fois près de lui. Qu'est-ce qu'on rajoute ensuite déjà ? Elle est malade, a envie de vomir, à la nausée peut-être ? Question de pouvoir quitter rapidement. Elle n'est tellement pas douée là-dedans. « Tu fais quoi dans le coin ? » lui demande-t-elle tout compte fait. Est-ce que se sont de ses affaires ? Probablement pas. Quelles questions devrait-elle poser à la place ? Elle n'en sait rien. Elle regarde partout sauf dans les yeux de l'homme et elle est en train de se dire qu'elle aurait dû faire comme si elle n'avait pas vu qu'il l'avait vu... cela aurait été beaucoup plus simple.

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Oui, cette cliente te paraît bien familière - et pour cause. C’est Rajni, une jeune femme que tu n’as pas croisée depuis..longtemps ? Tu te rappelles très bien qu’à l’époque, elle exsudait tellement de rage, de colère.. Bien pire que toi enfant, et pourtant, tu étais loin d’être un cadeau. Les injustices te faisaient toujours trop réagir. Mais c’était il y a plus de trente ans, tu t’es calmé avec l’âge et les enseignements de la Tour. Tandis que Rajni..oui, cette colère qu’elle semblait ressentir perpétuellement était bien plus profonde. Bien entendu, penses-tu, cela était normal d’un certain côté. Elle est nomade de l’air ; les siens ont vécu des tragédies dont tu n’as pas idée. Peut-être même que des membres de sa famille ont péri à cause de la Nation du Feu. C’est une possibilité qu’il ne faut hélas pas écarter. Et toi.. tu as beau avoir rejoint tôt la Tour et fait tiennes leur souffrance et leur colère, cela ne sera jamais pareil que de naître parmi les Nomades, avec les traumatismes que cela engendre maintenant. Même si à cet instant, il semble que cela soit plus de..la réticence à te voir qu’elle ressente, plutôt que cette fureur. Ah.

“Rajni. Cela fait longtemps.”  Tu inclines la tête, poliment. Qu’il ne te soit jamais reproché de manquer de savoir-vivre ; même dans un village un peu perdu, tu continues à appliquer cette politesse que l’on t’a inculquée. Tu représentes ta secte, tu ne peux lui faire honte en te comportant comme un énorme butor - même quand tu es froid, tu ne peux pas être impoli. C’est une question d’étiquette. De respect aussi. Mais voilà qu’elle te demande ce que tu fais ici.

“Un village des environs a requis l’aide de la Tour pour se débarrasser d’une créature qui leur causait quelques tracas ; c’est moi qui l’on a envoyé.”    Tu ne t’en plains pas. Tu aimes voyager, tu aimes le Royaume de la Terre, tu aimes venir en aide aux autres ; sur tous les plans, tu t’en tires gagnant. “Et toi ?” Sur le coup, tu es drôlement surpris de la voir ici. Quelles étaient les probabilités que vous vous croisiez dans ce petit village ? Assez faibles en réalité, même si tu voyages beaucoup.

“Que deviens-tu ?” finis-tu par demander. Tu n’as aucune idée de ce qu’elle a pu faire ces dernières années. D’un côté, c’était bien évidemment quelque chose qui ne te concernait qu’à peine. Rajni était déjà adulte ; ce n’est pas comme tes disciples, que tu guides de leur enfance jusqu’à la fin de leur vingtaine - voire plus, pour ceux qui iront jusqu’au rang de Grand Maître. Tu sais rester à ta place. “Tu peux t’assoir et partager mon repas, si tu le désires.” Qu'elle reste debout alors que tu es assis, en train de déjeuner - voilà qui est inconfortable. Mais après..c'est à Rajni de voir. Elle est assez grande pour prendre ses décisions.

Et puis, tu n’es pas aveugle ; tu te rends bien compte qu’elle n’est pas à l’aise en ta présence, pour une raison qui t’échappe.

Quoi dire, quoi faire ? Rajni n'en sait rien. Elle se sent coincée. Se rappelle-t-il d'elle ? Veut-il lui parler ? Veut-il faire comme si de rien n'était ? Elle ne sait jamais ce qui est mieux dans ce genre de situation. Xiaoyan règle la situation (a-t-il eu des questionnements intérieurs comme elle à ce sujet ?) Elle opine la tête, deux-trois ans lui semble-t-il. Dans les premiers mois après qu'elle soit partie de chez elle. Peut-être quatre ans en fait, elle n'en est plus très certaine. Les années ont passées assez vite trouve-t-elle. Les premiers mois sont plus au moins dans le flou, le reste de moins en moins au fur et à mesure du temps passé sur le Cursed Lotus et que sa colère a diminué pour se stabiliser. Elle n'en est pas exempte, loin de là, mais c'est moins présent et cela lui prend moins d'énergie. Sans être complètement sereine, elle se sent moins bouillante de colère. Une nette amélioration, même si c'est loin d'être parfait... mais qui est véritablement parfait au niveau des sentiments ? Il répond ensuite à ce qu'il fait là. « Quelle sorte ? » demande-t-elle. Et ce n'est pas pour rester polie ou faire semblant d'être intéressée. Elle l'est vraiment. Les créatures c'est un sujet intéressant trouve-t-elle. Le monde des esprits aussi. Elle est loin d'être rendue à cette étape, si c'est vert ceci qu'elle se dirige. Elle a tout de même entendue plein d'histoires chez elle à ce sujet. Son côté première de classe refait surface de temps à autre... un peu mieux que son côté toujours en colère.

La réponse lui est ensuite retournée. « Je viens voir ma mère. » dit-elle. Ce qui est la vérité. Cela ne coûte pas grand-chose de donner cela comme information. Sa mère pourrait être n'importe où dans les alentours. Ou elle pourrait partir pour y aller et elle est beaucoup plus loin. Dans des endroits publics, à un presque inconnu en plus, elle essaie de ne pas trop donner de détails... sauf si c'est absolument nécessaire. « Je me promène. » Encore une fois, elle se montre prudente. Elle ne va pas dire qu'elle fait parti d'un équipage pirate qui agit contre la nation du feu. Les murs ont des oreilles... surtout quand il n'y a pas de murs proches. « J'erre. » rajoute-t-elle. Ce qui n'est pas totalement faux non plus. Elle sait théoriquement où se rendre, mais pas toujours comment. « J'aide un peu partout... » Ce qui n'est pas faux non plus. Ses missions servent à aider, mais c'est plus spécifiques que de vendre des fruits et des légumes quelques jours pour dépanner par exemple. À sa grande surprise, il l'invite à s'installer et à partager son repas. « Merci. » fait-elle, tout en s'installant. Ça serait encore plus bizarre de faire comme s'ils ne se connaissaient pas après cela. C'est assez compliqué trouve-t-elle, toutes ses nuances de sociabilité.

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Un moment de silence, que tu trouves incroyablement long, s’installe. Comme si Rajni ne semblait pas très certaine de la marche à suivre - t’ignorer après ton salut, ce que tu aurais respecté, ou alors continuer la conversation, ce que tu aurais respecté aussi. De ton côté, tu ne le sais que trop bien, tu n’aurais pas pu faire comme si tu ne l’avais pas vue ; ta politesse, ton éducation, te l’auraient empêché. Sauf que tu ne sais pas quoi faire du coup, tu ne peux..qu’attendre. Et au final, elle te demande ce que tu fais-là, tu réponds..et elle semble étonnamment intéressée ?

“J’ai eu affaire à un kappa. C’est une créature aquatique de nature malicieuse, un peu embêtante mais pas dangereuse, dans la majorité des cas. L’astuce est de se montrer très poli avec elle, en s’inclinant pour la saluer. La créature se sentira obligée de faire de même, et perdra ainsi l’eau contenu dans le récipient sur son crâne. Cela la rendra inoffensive.”  , expliques-tu.  La Tour privilégiant l’apaisement des créatures plutôt que leur annihilation,  c’est cette marche à suivre que tu suis. Tu n’abats la créature que si tu n’as pas d’autres choix, seulement si tu as épuisé toutes tes options plus pacifistes ; parce qu’une créature que l’on ne peut pacifier représente un réel danger. Mais tant que tu le peux, tu suis la voie qui fait couler le moins de sang. Tu n’as, heureusement, pas encore croisé de kappa qui causait vraiment des soucis. “Cependant dans un premier temps, on peut aussi leur donner de la nourriture pour qu’ils restent à distance des habitations.”    Tout plutôt que de les voir rôder et voler de la nourriture, supposes-tu.  Pourquoi expliques-tu cela ? Parce que ce sont tes réflexes de professeur ? Parce que tu préfères encore que cette connaissance se diffuse, pour que les gens ayant affaire aux kappas puissent au moins essayer de gérer la situation seuls plutôt que d’appeler automatiquement des cultivateurs à la rescousse ? Probablement un mélange des deux.

Et ainsi la discussion commence. Tu apprends ainsi que Rajni est en route par aller voir sa mère, et tu approuves. “Je vois. J’essaye toujours de voir ma famille lorsque je passe dans ma région natale aussi.”   Elle se montre vague, tu restes assez vague aussi. Il n’y a pas beaucoup de monde à qui tu as parlé de ton enfance qui te paraît si loin déjà. Le village côtier, le dojo de tes parents, tes frères et sœurs, ton caractère de cochon de l’époque, ce sont des choses que tu gardes en général pour toi. Non vraiment, c’est curieux de voir comment les choses ont tourné. Tu ne connaissais même pas la cultivation à l’époque. “Ma foi, c’est une bonne chose d’aider. Le monde a besoin de gens de bonne volonté. Surtout en ce moment.”  Tu n’es pas idiot, tu sais qu’elle ne dit pas tout ; tu le respectes, bien entendu. A fortiori dans un lieu public.

Mais heureusement le serveur  arrive pour prendre la commande de Rajni, qu’il a probablement vue s’installer. Cela apporte une distraction bienvenue, et au moins - tu n’as pas besoin de te casser la tête pour faire la conversation.

La situation actuelle dérange les deux interlocuteurs, mais pour des raisons différentes : trop de silence et pas assez de silence. Rajni parvient tout de même à poser une question dont elle veut réellement connaître la réponse. Ce qui n'est pas toujours le cas lorsqu'elle se force. Son effort paie car Xiaoyan ne tarde pas à lui répondre, d'une réponse assez complète. Il aurait pu se la jouer mystère mystérieux, que seul les initiés peuvent le savoir et que cela ne la concernait donc pas. Après tout, il y a peut-être une sorte de protocole de cultivateurs empêchant la transmission de trop d'informations aux non cultivateurs. Une chance, car se sont des très bonnes informations qu'il donne. Elle ne s'attendait pas du tout à cette façon d'arrêter une telle créature. Il est vrai qu'elle ne connait pas vraiment de méthodes en particulier pour les arrêter en général. « C'est très intéressant... et surprenant. » La politesse qui peut tout changer, c'est une manière assez calme de pouvoir régler une situation. Tout n'est pas obligé que d'être violence. Ce qu'elle a parfois tendance à oublier avec les soldats de la nation du feu puisqu'ils ne semblent pas connaître d'autres langages. La surprise sur les kappa continuent (ou non, car elle ne savait pas grand-chose alors tout est nouveau en fait). « Hum... je connais beaucoup de personnes comme ça. » Pour qui ne pas manger est intolérable et change presque de personnalité lorsqu'elles ont trop faim. « Je prends note des deux méthodes, juste au cas. » Cela peut toujours s'avérer pratique de savoir comment gérer une telle créature. « Elles sont toutes aussi simples à gérer ? » demande-t-elle ensuite. Cela serait surprenant, mais on ne sait jamais. Poser des questions cela ne coûte pas grand-chose et cela entretien la conversation. Très pratique quand c'est l'autre qui répond et parle donc un peu plus.

Elle hoche ensuite la tête, ne rajoutant rien. Il semble tout à fait normal de visiter la famille quand on passe près et qu'on ne les voit pas souvent. Sauf quand on les évite comme elle a pu le faire ces dernières années. Elle opine de la tête de nouveau.  Le monde irait sûrement un peu mieux si plus de personnes aideraient. « Ce n'est pas toujours facile. » Elle se sent toujours plus à l'aise seule, dans son coin. Cela lui demande beaucoup d'effort d'aller parler et aider. Certes, elle le regrette rarement ensuite, mais les premiers moments sont toujours plus compliqués pour elle. Elle se sent rarement à l'aise en général, alors avec des inconnus... Rien qui l'empêche de faire ce qu'elle veut, elle y va juste avec du recul la majorité du temps. Elle commande ensuite une soupe aux légumes et une tasse de thé lorsque le serveur arrive. Elle est loin de penser que le tout n'est pas suffisant pour l'homme. Et dire qu'elle trouve qu'elle a fait de grand effort jusqu'ici.

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C’était gênant, penses-tu. Le silence était un peu gênant. Comment était-on censés faire lorsque son interlocuteur était aussi peu bavard - bavarde, dans ton cas-, que soin ? C’était un mystère que tu n’as jamais réussi à complètement élucider, et voilà le résultat. Il y avait des moments, comme ça, où tu regrettes de ne plus être l’enfant que tu as été, terriblement spontané ; maintenant que tu as dépassé la quarantaine tu te sens parfois presque engoncé dans la bonne éducation que l’on t’a inculqué, comme incapable de réagir de façon naturelle. Une autre personne aurait réussi à engager une vraie conversation : pas toi. Trop conscient de ton rôle au sein de ta secte, trop inquiet de commettre un impair et de perdre la face. Mais ne commettais-tu pas un impair à ce moment précis, en étant aussi peu disert ? Les relations sociales étaient quelque chose de si compliqué parfois. Alors en plus en face de Rajni que tu ne connais, au fond, que très peu..forcément..

“Les créatures sont souvent surprenantes, chacune à leur manière.” acquiesces-tu. Dans ta carrière -qui commence à se faire longue- de cultivateur, tu as croisé bien des créatures plus ou moins étranges, plus ou moins agressives aussi, mais aucune n’était inintéressante. Chaque rencontre était l’occasion d’apprendre quelque chose de nouveau, ou de relever quelles erreurs tu peux avoir commises. Fort heureusement, le petit kappa d’aujourdh’ui n’a pas posé de gros problème. Un kappa standard, en quelque sorte.  “Comme les humains, pourrait-on dire. Et encore, je trouve certaines créatures plus simples à comprendre.“ Même à plus de quarante ans, il t’ arrive encore d’être surpris par certaines réactions. Les tiennes y compris. L’être humain est une créature incompréhensible, en réalité.

“Absolument pas. Certaines créatures sont en général inoffensives, mais d’autres sont un peu plus..comment dirais-je..malveillantes, et s’en prennent aux humains. Cela peut aller jusqu’à des cas de possession..”Autant dire que quand tu es assigné à ce genre de mission, la prudence est de mise. “Parfois, il peut s’agir aussi d’un esprit qui ne trouve pas le repos, et il faut d’abord chercher à l’apaiser.” Et peut-être est-ce là la partie la plus gratifiante de ton occupation. Apaiser les esprits troublés, en accomplissant leurs dernières volontés. “ C’est ce que préconise la Tour. D’abord tenter une manière de faire plus pacifiste, et si cela ne fonctionne pas, alors il faut prendre des mesures plus radicales.”  Là où la Forteresse a plus tendance à trancher dans le vif, si tu peux penser ainsi.

“Non, en effet. Surtout par les temps qui courent.  On ne sait jamais ce qui peut arriver.”  Les soldats du feu n’ont pas encore atteint cette petite ville ; pour combien de temps ? ne peux-tu t’empêcher de penser. Que fait le Royaume de la Terre ? Va savoir. La politique, voilà un domaine dans lequel il n’est pas dans tes attributions de t’y aventurer.  Toi, tu règles les soucis surnaturels. Le reste.. Mais voilà que le serveur arrive pour prendre la commande de Rajni. Tu en profites pour te resservir une tasse de thé. Cette petite auberge est bien agréable, notes-tu dans un coin de ta tête. Pour le moment.  Tu espères juste que tu n’as pas mal choisi ton jour, et qu’une quelconque bagarre ne va pas éclater. En rentrant d’une mission, tu es parfois un peu à cran à cause de la fatigue ; et tu risquerais d’être un peu plus rude qu’à l’ordinaire.

Rajni opine de la tête. Elle n'a aucune difficulté à croire Xiaoyan au niveau des créatures. Elle ne verrait pas pourquoi elles devraient être ennuyantes et logiques ;c'est une description qui lui va à elle humaine, alors... « Je n'en doute pas. » Elle est bien d'accord avec cela. Elle trouve que la majorité des interactions humaines très compliquées. Trop compliquées. Elle ne sait que rarement quoi dire ou quoi faire. Elle a souvent l'impression d'être à côté lorsqu'elle interagit et est loin de tout comprendre au niveau des réactions. Des possessions. Un air surpris s'affiche sur son visage, elle en avait entendu parler, mais c'est à présent confirmé. Cela doit être assez bizarre à vivre. Et à voir aussi, mais surtout à vivre. Toutes ces informations sont vraiment très fascinantes et instructives. « Apaiser ? Comment ? » le questionne-t-elle. Elle ne pense pas qu'elle le dérange peut-être. Il est ici pour pouvoir se reposer et non pas donner un cours sur la cultivation. Elle aurait pu savoir tout cela avec les cultivateurs de chez elle, mais elle était trop concentrée sur ses propres études pour devenir la plus puissante rapidement qu'elle ne l'a pas assez fait. Elle était décidée à perdre le moins de temps possible au niveau des distractions non reliées à ses études. Ce qui explique très probablement sa difficulté avec les relations humaines. Elles ont bien vite été mises au niveau des distractions inutiles et elle n'y a jamais trop porté attention. Elle aurait peut-être dû. Ce qui est assez facile à penser avec le recul et qui est assez difficile à changer. Enfin, elle trouve. Elle ne sait pas non plus trop comment le demander.

« On ne peut pas toujours prendre ce genre de méthode avec la nation du feu. » Pacifiste puis radicale. C'est surtout le dernier qui prime. « Ce n'est pas toujours reposant. » Elle est presque toujours sur ses gardes, ne se rappelle pas de la dernière fois où elle a pu dormir complètement de façon sereine, même lorsqu'elle est à bord du Cursed Lotus et qu'il y a les autres membres de l'équipage qui font des tours de garde, qui ne s'endorment pas tous à la même heure, qui ne se réveillent pas tous à la même heure, qui n'ont pas tous le même type de sommeil... bref, elle est souvent inquiète, prête à se battre n'importe quand, même en dormant. Certes, parfois la fatigue l'emporte à force d'être dans une sorte d'état de veille sans vrai sommeil, mais le reste du temps elle dort moins bien, jusqu'à ce que la fatigue l'emporte. Presque, rien de très optimal, sauf qu'elle ne peut pas s'en empêcher. Sa commande est passée, elle a hâte de manger. Elle commence à avoir bien faim après le chemin qu'elle a pu faire jusqu'à cette auberge.

La conversation commence doucement, et tu dois avouer que tu es un peu soulagé. Tu avais peur que la jeune femme et toi vous regardiez en chien de faïence, avec le bruit de vos baguettes pour toute distraction. Heureusement, tu as réussi à donner le change.  Forcément d’un côté. Tu discutes de ta carrière - de ta vocation qui est née alors que tu étais si jeune -, alors forcément, tu ne peux qu’être à l’aise. Si tu avais l’une ou l’autre de tes élèves en face de toi, il  est possible que tu aurais pris un ton plus formel, plus doctoral ;  plus adapté un véritable cours, plutôt qu’une simple conversation. Tu restes assez superficiel et général pour ne pas trahir les secrets de ta secte, mais assez détaillé pour que Rajni ne se sente pas flouée par tes réponses-qui-n’en-seraient-pas-vraiment.

“Eh bien, parfois, il peut s’agir d’essayer de réaliser les dernières volontés du défunt dont l’esprit ne parvient pas à trouver le repos. Dans une certaine mesure, évidemment. “  S’il s’agit de revoir une personne aimée, ou d’essayer d’apaiser les regrets de l’esprit en question, cela restait raisonnable.  Si c’était un esprit plus vengeur, pas question de massacrer des gens pour ses beaux yeux ; là, l’annihilation était de mise. Mais il n’y avait pas que cela. Parfois, la cultivation musicale est de mise - la spécificité de la Tour. “On ne peut savoir quelle méthode appliquer avant de voir l’esprit ou la créature en question” , conclus-tu. Là-dessus tu ne diras rien de plus. Tu n’as pas l’impression qu’un espion du Feu rôde dans les parages, mais on ne sait jamais.

“Si seulement.”   réponds-tu juste. Si seulement la Nation du Feu pouvait être pacifiée par la cultivation de la Tour, le monde ne s’en porterait que mieux. Au lieu de ça, des soldats se promènent sur une bonne partie du territoire du Royaume de la Terre, et la Nation du Feu a engendré sa propre secte de cultivation - de sorcellerie plutôt-, ce maudit Temple du Soleil pourpre dont tu n’as entendu que des échos…très peu flatteurs.Ces abominations. “ Mais ce n’est pas techniquement l’affaire des sectes de cultivation.”   ajoutes-tu à voix plus basse. Techniquement. Même si tu as ton propre avis, plutôt marqué, sur la question : tu n’es pas aussi pacifique qu’un Nomade de l’Air, et tu n’as jamais osé le prétendre.

“Non en effet.”  approuves-tu. “Les esprits soient loués, la méditation peut aider à trouver une forme d’apaisement.”  Tu en sais assez sur la question ; tu médites dés que tu en as l’occasion, notamment avant d’aller te coucher. Ca t’aide à dormir, malgré la difficulté que tu as parfois à dormir, lorsque tu entends les exactions de la Nation du Feu..ou même en mission, d’ailleurs.

Xiaoyan ne semble pas être mal à l'aise ou fatiguée de continuer de parler de son métier. Ce qui est une chance, car Rajni continuerait fort probablement à lui poser d'autres questions malgré tout, avide d'apprendre. « Du genre si quelqu'un n'a pas trouvé ses derniers vœux ou ment à ce sujet ? » Pour rester dans le côté plus léger du sujet de la mort. Elle sait très bien que toutes les morts ne sont pas naturelles et que si les vivants ne trouvent pas qui a interrompu cette vie, cela doit être fâchant pour certaines personnes. Elle n'aborde pas le sujet, sachant très bien qu'ici, dans une auberge, autour d'une tasse de thé et d'un bol de soupe, cela n'est pas la meilleures des occasions. Et pourtant, elle est la première à manquer de tact en général. Peut-être que s'ils se voyaient plus souvent ou que si elle comptait devenir cultivatrice (enfin, si elle était simplement humaine), elle pourrait aller plus loin. Là, la surface lui va très bien pour cette occasion et cette conversation plus au moins spontanée puisqu'ils se sont retrouvés par hasard ici. Elle est avide d'apprendre, mais il y a des limites selon le moment juge-t-elle. Elle opine ensuite de la tête. Cela lui semble normal que tous n'aient pas besoin de la même action que la cultivation peut apporter. Elle fait ensuite un mince sourire. La nation du feu n'est l'affaire de personne, alors c'est l'affaire de tous en quelque sorte. Chaque gestes posés, même si ce ne sont que des petits gestes, à les contrer, est une bonne chose trouve-t-elle. Il est vrai qu'elle est assez biaisée à ce sujet. Il se met ensuite à parler de méditation. Elle ne rajoute rien, elle n'a pas tendance à méditer, se contente de manger sa soupe. Ce qui est assez étonnant pour une nomade de l'air, mais elle n'aime pas être encore plus dans ses pensées. Elle sait que ce n'est pas que cela, mais elle n'arrive pas à dépasser ce premier point. Elle préfère l'action. Certes, elle peut passer des heures à lire, à apprendre, à écouter, à observer, mais s'installer et méditer tout simplement, elle a bien de la difficulté à juste faire ceci. Ou rien faire, même si ce n'est pas rien.

Puis, un bruit de vaisselles qui tombent se fait soudainement entendre et la nomade de l'air regarde ce qui se passe, pas seulement par curiosité, mais au cas où elle aurait besoin de se défendre. Deux clients de l'auberge sont en train de se regarder face à face, l'air mauvais. Est-ce que cela va en rester là ou bien cela va finir en soirée moins calme qu'elle ne l'a été jusqu'à présent ?

Tu parles, tu parles, tu parles. Tu parles de ton métier plutôt que de toi, comme toujours. C’est plus simple, même si cela peut paraître stupide. Mais tu as toujours été ainsi : terriblement secret, dissimulé derrière tes robes de cultivateur et les hautes murailles de réserve que tu as décrété être une partie essentielle de ta personnalité. Tu ne te confies pas, tu ne dis rien sur tes états d’âme. Même à ta femme tu ne te confies qu’à demi-mot ; mais depuis le temps que vous formez un couple, elle a appris à déchiffrer tes silences, à interpréter le signe le plus minime de joie ou d’agacement sur ton visage.  Lorsque tu as amené Zhihao à ton village natal, tu t’es laissé aller à un léger épanchement, mais c’est bien tout, c’était exceptionnel et ton élève et toi en étiez tous les deux conscients.  Et pourtant, les esprits savent à quel point tu tiens à elle ; à quel point tu la considères comme ta fille.

Alors, ce n’est pas dans une situation pareille, à l’intérieur d’une auberge où tu prends en repas en compagnie d’une quasi-inconnue, toute nomade de l’air qu’elle soit, que tu pourras réellement te livrer. Il est plus simple de parler de ce que tu fais, de se maintenir à ce degré de distance même si indirectement, parler de ton métier c’est parler de toi. Ca ne reste pas toi exactement.  Cependant, tu ne peux pas nier que c’est agréable d’avoir une audience aussi intéressée. Une personne étrangère à la Tour t’aurait sans doute trouvé ennuyeux. Peu importe.

“Plutôt si la personne est partie en ayant des regrets.”   corriges-tu, doucement. “Il faut dans ce cas, essayer de s’entretenir avec la famille du défunt pour voir comment réaliser ces fameuses dernières volontés, ou interroger l’esprit lui-même. Heureusement, un esprit ne ment jamais”  , conclues-tu enfin. Tu n’en diras pas plus. Tu ne trahiras pas les secrets de ta secte, qui pourraient être, techniquement, considérés aussi comme les secrets de la Forteresse. C’était de là que venait l’idée de cultivation musicale après tout.

Mais voilà qu’un fracas de vaisselle retentit, et tu jettes rapidement un regard sur la source du bruit. Une bagarre d’auberge. Bien entendu. Ci-git, ton espoir de passer une soirée tranquille.  Ta main vient discrètement se poser sur ton paixiao, au cas où, et tu fronces légèrement les sourcils.  Tu entends le ton monter entre les deux clients de l’auberge, et tu échanges un regard avec Rajni. Vont-ils en venir aux mains ? Ne devrais-tu pas intervenir ?

La conversation va bon train, ce qui est assez surprenant avec Rajni qui est loin d'être la plus bavarde. Il est vrai qu'elle écoute surtout, posant des questions... ce qui est bien mieux que bien des fois où le sujet ne l'intéresse pas et qu'elle espère juste que le tout finisse rapidement. Là, ce n'est pas le cas. Elle aime apprendre et Xiaoyan ne semble pas être embêté par le fait qu'elle le questionne sur son travail bien qu'il ne travaille pas. Il est vrai que même s'il avait eu un air embêté, elle ne s'en serait peut-être pas rendue compte, et si cela avait été le cas, elle n'en aurait pas tenu compte. Elle apprend et peu de choses peuvent l'arrêter de le faire. « Oh. Moins glauque. » fait-elle lorsque l'homme précise un peu plus ce qu'il voulait dire en premier sur certains esprits revenant. Des regrets. Quelque chose lui dit qu'elle va sûrement rester longtemps après sa mort. Il lui semble qu'elle n'a que des regrets. M'enfin, elle retourne voir sa mère, cela va en faire un de moins. Bon, elle aurait dû y aller avant, elle le sait, mais ne se sentait pas prête. Elle est ici tout de même dans cette auberge, presque arrivée au lieu d'être déjà là où elle a été élevée. Elle opine de la tête. « Cela doit aider. » Les mensonges sont assez compliqués à gérer et elle en sait quelque chose avec ce qu'elle raconte sur ses origines et ce qu'elle fait. Puis, leur conversation est interrompue par ce qui semble être une dispute (enfin, elle suppose) qui se met à prendre une plus grosse proportion, accaparant l'attention de toute l'auberge ou presque. L'altercation ne diminue pas malgré l'intervention amicale des employés de l'auberge et de quelques clients. En fait, cela semble même les encourager à agir, comme si tout ce qu'ils attendaient étaient d'attirer l'attention et de se donner en spectacle. Ou bien ça ne fait que faire grimper leur adrénaline et ils n'arrivent plus à se contrôler. Bref, peu importe la raison, la table se renverse, un coup est donné sur une serveuse et c'est la pagaille dans tous les sens. « Y'aurait pas un esprit qui enflamme les... esprits ou c'est juste l'alcool ? » qu'elle demande, prête à réagir si jamais on vient trop près de leur table ou si le tout empire encore plus.

Si on t’avait dit que tu pourrais avoir une conversation aussi..comment dire, vivante ? intéressante ? avec une non-initiée de la Tour quelques jours avant que tu ne partes en mission, tu ne l’aurais pas cru. Tu aurais été encore plus dubitatif si l’on t’avait dit que cette conversation serait avec Rajni. La dernière fois que tu l’as vu, elle te semblait pleine de colère et prête à se battre ; mais aujourdh’ui, elle te paraît plus posée..et surtout, incroyablement intéressée par tes explications concernant ton métier, si vagues soient-elles. Si Rajni n’avait pas été élémentale, aurait-elle pu faire une bonne cultivatrice ? te demandes-tu intérieurement. Aurait-elle eu, sinon la vocation comme toi, au moins assez d’intérêt ? Aurait-elle été assez proche de sa spiritualité pour faire une bonne cultivatrice ? Autant de questions que tu te poses,et auxquelles tu n’as pas de réponse. Avec des si, on mettrait Omashu dans un flacon de saké après tout.

“On peut dire cela.” Glauque. Encore une expression pas très protocolaire, si tu peux parler ainsi. Tu ne relèves pas ; Rajni n’est pas ta disciple, elle n’a pas à atteindre le niveau d’exigences que tu imposes à tes élèves.. “En effet. Au moins, on est sûrs de partir dans la bonne direction pour résoudre le problème.” Ce qui était déjà un immense progrès par rapport à la situation initiale. Après, encore fallait-il que les dernières volontés du défunt soient réalisables. Et décentes. Si le regret d’un défunt était de voir son ennemi mort, ce n’est pas toi qui vas réaliser ce genre de vœu.  “La discussion est devenue un peu trop macabre pour un repas, je te prie de m’excuser. “ Tout le monde n’était pas forcément à l’aise à l’idée d’évoquer ce genre de sujets pendant qu’il ou elle mangeait. Toi..pris dans tes explications, tu as un peu oublié où tu étais. La preuve que personne n’est pas parfait, à commencer par toi.

Ce qui est encore moins parfait, cependant, c'est bien la soirée qui s’annonce. Tu as bien entendu le fracas de vaisselle -rien d’inhabituel dans une auberge, ce sont des choses qui arrivent-, mais ce qui suit te fait froncer les sourcils. Le ton monte, les éclats de voix arrivent, une table se renverse et..Ci-git, l’idée de passer une bonne soirée, penses-tu.

“Je ne perçois rien. Mais l’alcool et un tempérament chaud font des ravages.” Ton ton est devenu un peu grinçant, malgré toi. Il n’y a, à ton humble avis, rien de pire que ces bagarres d’auberge.  C’était la preuve d’un énorme manque d’éducation… et la situation n’alla pas en s’améliorant. La pauvre serveuse se fit prendre le bras par un rustre qui décida  de...l’agonir d’injures ? La traiter comme du poisson pourri ? Alors que les coups commençaient à partir dans tous les sens autour d’eux.

Tu te lèves calmement, et, enfin, tu interviens. Tu te frayes un chemin vers la pauvre serveuse qui devait être incroyablement paniquée, et finalement, tu tends Ruying entre la serveuse et le client mécontent pour former comme une barrière protectrice. . “Veuillez laisser cette serveuse tranquille. “ Ton ton est devenu incroyablement froid et professionnel. Impersonnel même. Le client te dévisage, t’examine, toi et ton épée, de haut en bas. Son visage se crispe un peu alors qu’il semble reconnaître les couleurs de la Tour,  puis il retourne s’assoir non sans maugréer, et tu indiques à la serveuse de quitter rapidement les lieux. Bon..Au moins, tu as réussi à apaiser la situation, petit îlot de calme au milieu du chaos qu’est devenu cette pauvre auberge.

Rajni continue d'écouter Xiaoyan à propos de comment gérer les esprits qui restent après leur mort. Les aider quand ils ne sont pas trop agressifs, essayer de les comprendre si c'est le cas. C'est une autre sorte de mission qui manque un peu de réalisme tout de même pour elle. Elle préfère les actions concrètes qu'elle fait avec le Cursed Lotus, mais aime bien tout de même en apprendre. Et on ne sait jamais, cela pourrait s'avérer éventuellement plutôt pratique. Il s'excuse ensuite et elle secoue la tête. « Je n'ai pas de problème avec ça. » dit-elle. Elle a 'habitude de lire et de manger en même temps, peu importe la sorte de lecture. Elle pense donc avoir l'estomac assez accroché et la conversation qu'ils ont en ce moment ne la dérange pas. Elle n'aurait pas continué à poser des questions si tel avait été le cas. Faire semblant de s'intéresser à un autre sujet, très peu pour elle. C'est peut-être malpoli, mais ce n'est pas hypocrite, on peut au moins lui donner cela. À moins que ce ne soit pas vraiment plus une qualité malgré tout. Puis, leur sujet change plus au moins lorsqu'un grand bruit attire leur attention et elle demande si cela ne serait pas un esprit. Et ce n'est pas le cas. Elle s'en doute, mais cela aurait été un drôle de hasard. « Un peu trop... » fait-elle. L'alcool est tout de même une assez bonne (mauvaise) explication. Elle n'aime pas trop boire, ou boire tout simplement. Elle n'aime pas avoir sa tête et ses capacités altérées, perdre le contrôle d'elle-même. Elle préfère garder toute sa tête. Elle ne voit pas non plus l'intérêt de trop boire, surtout avec les effets du lendemain. Elle opine donc de la tête, d'accord que l'alcool peut faire des ravages et ce, peu importe le type de tempérament. L'alcool a des effets insidieux pouvant même changer selon les fois où il est ingéré.

L'homme se lève, se dirigeant vers le malotrus, et elle le suit, juste au cas où le tout pourrait mal aller. Pas qu'elle ne fait pas confiance aux capacités de Xiaoyan, mais on ne sait jamais ce qui peut arriver. Et très peu pour elle de laisser les autres faire le plus difficile et de simplement regarder. L'épée est montrée, ce qui semble le calmer. Rien ne se passe. M'enfin, c'est ce qu'il semble. Pour le moment, tout semble être sous contrôle. Elle retourne donc à la table, afin de continuer de manger et de boire son thé. « On ne rigole pas avec une épée comme ça. » À moins de savoir se débrouiller avec une ou avec une autre sorte d'armes. Ce qui ne semble pas être le cas de l'homme, devant trouver qu'habituellement les menaces doivent être suffisantes avec un ton assez fort. L'intimidation ne fait pas tout et il semble avoir trouvé chaussure à son pied, chaussure trop grand même. N'empêche, il va tout de même falloir le surveiller, au cas où une plus grande ingestion d'alcool serait fait avec un sentiment de courage qui semble souvent venir avec.

Tu te contentes de hocher la tête, à la réponse de Rajni. La discussion, devenue passablement morbide il faut l’admettre, mais qui te passionne - aider les autres est ta vocation en effet -,  ne semble pas la déranger outre mesure.Tant mieux. Tu sais que parfois, lorsque tu parles de ton métier, de ta vocation, tu te laisses parfois aller ; tu oublies presque que ton interlocuteur n’est pas aussi aguerri que toi dans l’art de la cultivation, et tu parles, tu parles, tu parles. C’est assez incroyable lorsque  tu y penses ; toi qui es si peu bavard d’habitude. La situation est d’autant plus incroyable que tu as réussi à parler longuement tout en limitant ce que tu disais. A ce niveau-là, cela relève du talent.  Encore plus étant donné que Rajni était réellement intéressée parce que tu disais - tu salues mentalement sa..résistance ? Sa capacité à ne pas se laisser perturber par tes explications devenues brutalement morbides..macabres..tout sauf gaies, en résumé. Après, Nomade de l’Air, elle est malheureusement habituée aux horreurs. Tout comme toi. Au moins tes explications ont l’avantage d’avoir une dimension un peu plus..pleine d’espoir, que ce qui arrive à ceux qui sont devenus ton peuple.

“Un peu trop aussi à mon goût.” Tu n’as rien contre un verre d’alcool occasionnellement en théorie, mais s’enivrer de la sorte ? C’est juste pitoyable. Cela montre un manque absolu de contrôle de soi-même. Les pulsions du corps avant toute chose. Que cela soit boire pour oublier ou non, tu trouves ça incroyablement pathétique. Quel est l’intérêt de perdre le contrôle de ses mouvements, jusqu’à s’évanouir ? Tu ne le comprends pas. De tous les sujets en rapport avec le monde en dehors de la Tour, l’alcool est un de ceux que tu comprends le moins. Mais peut-être est-ce la façon dont tu as été élevé, à la Tour. Ou pas, vu la réaction de Rajni.. Tu comprends encore moins quand l’alcool rend violent. “Cette situation est juste pathétique.” Oups, peut-être fais-tu preuve d’un peu trop de jugement envers autrui. Mais que dire de plus quand une pauvre serveuse qui n’avait rien demandé se retrouve entraînée dans cette bagarre ?

Ton intervention fait mouche, néanmoins. La situation se calme un peu - au moins pour cette serveuse. “Non en effet. Une épée spirituelle n’est pas un jouet, et Ruying n’a pas bon caractère. Elle n’aime pas le brouhaha, et moi non plus.”  Le désordre, les combats de bar, c’est tout ce que tu détestes et qui est en complet désaccord avec les valeurs de la Tour. Et qui te fatigue. Tu n”as rien contre la légèreté du peuple de l’Air, que tu trouves au contraire rafraîchissante. Mais là, ce n’était pas de la légèreté. C’était..

Et Blam ! Sans prévenir, la bagarre reprend de plus belle -ou de plus laide, c’est selon-,  et voilà qu’un homme finit dans la table  à côté de la vôtre. C’est une blague, songes-tu. Quelle mouche pique donc les clients de cette auberge? Y avait-il quelque chose dans l’alcool ?