We are the kids of war and peace

13e jour du 9e mois  (ft.  [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] )

Depuis la fête des fantômes, les choses s'étaient précipitées. Qionghua s'était fait avoir comme une débutante, se faisant ainsi attirer dans le monde des esprits alors qu'elle était à Ba Sing Se. Elle avait rencontré de nouvelles personnes dont Liu Qiao, qui ressemblait comme deux gouttes d'eau à la jeune nomade de l'air qu'elle avait sauvé quelques semaines auparavant. Il y avait également Xiaoliang, originaire de la capitale tout comme toi, ainsi que Atiqtalaaq - surnommé Atiq - qui provenait de l'un des pôles. Après avoir franchi une faille qui les ramènerait dans le monde des mortels, la cultivatrice pensait qu'ils atterriraient là où ils avaient disparu. Cependant, cela n'avait pas été le cas. À son grand étonnement, leur porte de sortie les avait emmener près de la cité d'Omashu. Elle avait entendu parlé de la situation de la capitale du sud, la Nation du Feu qui ne cessait pas de l'attaquer. Sauf qu'elle ne pensait pas que la situation était telle que le roi Kang tardait à envoyer des renforts. Elle avait hésité, la belle. Rester pour donner un coup de main ou rentrer chez elle, auprès de sa shijie, et oublier ce qui venait de se passer ? Son coeur avait cédé et elle était restée. Le cultivateur de la Porte de l'Aurore céleste était lui aussi resté au sein d'Omashu et, ensemble, ils avaient combattu. C'était la première fois qu'elle rencontrait quelqu'un des pôles, mais également de cette secte dont elle avait déjà entendu parlé. Qionghua apprenait chaque jour un peu plus à le connaître et elle se rendit compte qu'il ne fallait pas se fier aux apparences. Il était bien bâti le jeune homme, mais son caractère était loin de refléter cette apparence.

Après des mois à défendre la cité, Omashu connu enfin du repos. Les troupes du roi arrivèrent enfin et même des membres des Tribus de l'Eau vinrent prêter main forte. Trois jours s'étaient écoulés depuis cette victoire contre la Nation du Feu. Certains célébraient, d'autres pleuraient leurs proches. Qionghua, elle, se remettait doucement de blessures mineures. Rien de bien inquiétant et elle cachait le tout sous un hanfu aux couleurs de sa secte - vêtement de prédilection dont elle ne se lassait jamais. Il n'y avait que cette égratignure sur sa joue droite qui était visible et qui rappelait qu'elle avait combattu aussi. Assise sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, elle était en train de broder une pivoine. Elle résidait dans une auberge au centre de la ville qui avait été épargné par les attaques. Concentrée sur sa création, elle entendit à peine une personne frapper à la porte de sa chambre. Ce fut plutôt un mouvement qui attira son attention. « C'est toi, Atiq ? » demanda-t-elle en levant doucement la tête en direction de la personne qui venait d'entrer. Qionghua tutoyait que rarement les autres, mais elle considérait le jeune homme comme un ami.

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Cela fait des semaines que tu es à Omashu et enfin, tu entrevois le jour où tu rentreras chez toi. Tu as envoyé un courrier, pour prévenir les tiens de ce qui t’étais arrivé dans le monde des esprits et que tu désirais rester au Royaume de la Terre pour les aider dans le siège contre la Nation du feu. Parce que c’est ton devoir, en tant que cultivateur, de protéger la vie autant que possible. Il y avait de nombreux innocents dans la ville. Tu as donc cru que c’était ton devoir de rester. Sans recevoir de réponse, tu n’as pas jugé nécessaire de rentrer à la maison et tu espères que le message s’est bien rendu à destination et que personne ne s’inquiète trop pour toi au Pôle Sud… Mais maintenant que les combats ne font plus rage, que la victoire est votre, tu vas pouvoir rentrer, retourner à ton apprentissage. Mais surtout réfléchir à tout ce que tu as vécu au cours des derniers jours. Les combats n’avaient rien à voir avec les incursions que vous connaissez au Pôle, quand les navires viennent et que les soldats rouges enlèvent vos maîtres de l’eau. C’était… complètement différent et une part de toi est un peu brisée depuis, même si tu fais de ton mieux pour le cacher. Heureusement, ton cercle de connaissance est plutôt restreint sur place et c’est plus facile de dissimuler tes véritables pensées.

Parmi les quelques personnes que tu connais, car il faut admettre qu’elles sont peu nombreuses, il y a Qionghua. Votre rencontre a été plutôt étonnante et imprévue. Vous vous êtes croisés dans le monde des esprits et c’est bien grâce à elle et à ses compagnons que tu as pu le quitter sain et sauf. Surtout grâce à Liu Qiao, puisque c’est elle qui a remarqué les fleurs de lune. Enfin, on lui a dit de les suivre, conseil qu’elle vous a généreusement partagé. Cette drôle d’expérience a forcément donc eu la conséquence de forger des liens et c’est avec une certaine agréable surprise que tu as retrouvé la jeune couturière sur les lignes au front puisqu’elle avait décidé elle aussi de prêter main forte. Tous deux étrangers dans cette ville, réunis par les esprits, c’était peut-être le destin qui vous faisait signe de vous rapprocher et après ces quelques semaines à combattre côte à côte et à apprendre à se connaître, tu en es venu à considérer la jeune femme comme une amie. Et depuis quelques minutes, tu te tiens devant la porte de sa chambre à l’auberge où vous logez tous les deux, hésitant à cogner. Tu inspires profondément.

Toc. Toc.

Tu ouvres la porte silencieusement et te faufile à l’intérieur, fermant le battant avec toi. Elle doit t’avoir reconnu parce que c’est ton nom qu’elle souffle du bout des lèvres. Ce n’est pas la première fois que tu t’invites et tu supposes que tout comme toi, elle n’a pas forcément de nombreuses connaissances sur place.

- Désolé de m’inviter encore une fois, réponds-tu de ta voix de tenor.

Tu t’avances un peu plus dans la petite chambre qu’elle occupe. Assise au bord de sa fenêtre, elle travaillait avec son aiguille. Ses broderies ont toujours le talent de t’impressionner, vous n’avez pas l’habitude d’orner les tissus de cette façon chez toi et tu trouves le tout drôlement fascinant. Est-ce que Macha aurait aimé ce genre de décoration? La plupart du temps, tu ne penses plus à elle, c’est du passé, mais ces derniers jours, elle se rappelle souvent à ton souvenir bien malgré toi. Tu aurais presque envie de retourner au Nord, pour observer de loin.

Tu tends un paquet à la cultivatrice. C’est tout petit, mais tu as travaillé fort pour l’obtenir malgré sa taille peu conséquente.

- Tiens, c’est pour ta joue. Cet onguent prévient les cicatrices.

Si tu t’es tranquillement fait à l’idée que les femmes puissent se battre aux côtés des hommes, tu ne peux pas concevoir qu’on puisse les laisser porter les traces de blessures sur leur visage. Qionghua est d’ailleurs très jolie et ce serait un véritable gâchis de laisser une vilaine marque sur son visage.

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Les deux coups contre la porte ne suffisent pas pour la faire sortir de ses pensées. Concentrée sur la nouvelle broderie entamée ce matin-même, Qionghua est plutôt attirée par un mouvement qu'elle perçoit du coin de l'oeil. Alors, elle lève la tête et prononce le premier nom qui lui vient à l'esprit. Atiq. Jeune homme de la tribu de l'eau, au caractère doux qui diffère de son imposante carrure. Elle a deviné juste, la belle couturière. Un sourire étire doucement ses lèvres alors qu'elle dépose son travail sur le cadre de la fenêtre, avant de se lever pour franchir les quelques pas qui la séparent de son ami. « Tu n'as pas à t'excuser, tu ne me déranges pas. » Cela en aurait été autrement si elle s'occupait d'une importante commande, mais actuellement, elle brode pour le simple plaisir. Un passe-temps qui est devenu une passion au fils des années. Elle est heureuse de travailler dans un domaine qui lui plaît, même si le simple fait de travailler ne plait pas à son père. La fille d'un noble ne devrait pas faire de telles choses, mais elle s'en moque bien. Cette famille a décidé de l'envoyer au Jardin des Parfums dissimilés, pour respecter la tradition, alors elle a bien le droit de faire ce qu'elle souhaite.

Ses pupilles se posent sur le petit paquet que lui tend le cultivateur. Intriguée, elle le prend avant de le déballer. Elle ouvre ensuite le contenant pour y voir l'onguent qui s'y trouve. Il s'agit d'un produit pour que la blessure sur sa joue ne laisse aucune trace sur sa peau. Une attention qu'elle apprécie. « C'est vraiment gentil Atiq, merci. » Qionghua s'éloigne pour s'asseoir devant un petit meuble, orné d'un miroir. Elle y observe son reflet un moment avant d'appliquer le présent sur sa joue. La crème recouvre désormais la blessure, brûlant légèrement. Puis, elle range le présent dans un tiroir. « Maintenant que les troupes de la Nation du Feu se sont retirées, que vas-tu faire ? » lui demande-t-elle en se retournant vers Atiqtalaaq. Peut-être veut-il retourner auprès des siens ? Ils doivent tous s'inquiéter pour lui. Comme c'est le cas de sa shijie. Celle qu'elle considère comme sa soeur est au courant de sa présence à Omashu et même si Qionghua lui écrit aussi souvent que possible, elle sait que cette dernière s'inquiète. C'est plus fort qu'elle. Pour sa part, elle va certainement rentrer à Ba Sing Se dans les prochains jours.

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Tu observes la jeune femme utiliser tout de suite ton présent avec une certaine satisfaction. Tu as quand même pris le temps de chercher un marchand qui semblait assez fiable avant de te le procurer : il y a tellement de charlatans qui profitent des conflits pour s’enrichir au détriment des pauvres gens naïfs et désespérés par les temps qui courent. Il serait regrettable que ce qui doit prévenir les cicatrices laisse une marque de brûlure sur son délicat visage ou tout autre marque indésirable. Tu hoches la tête, pour montrer ton approbation et reste tout de même plutôt content de la voir ranger soigneusement le petit pot – qui malheureusement manque peut-être un peu de finesse et de joliesse – dans un tiroir.

Sa question te laisse toutefois songeur. Rester à Omashu n’avait pas été un choix facile. La première fois que tu as quitté la maison, c’était pour t’installer définitivement au Pôle Sud et ne plus en partir. Tu sais que ta présence au Royaume de la Terre n’est que temporaire et qu’il faut retourner poursuivre ton apprentissage, ton passage dans les rangs des forces armées d’Omashu des dernières semaines t’ont appris que tu es loin d’être suffisamment formé. Maintenant que les troupes sont parties… y a-t-il encore une raison de rester?

- Je… Je crois que je vais rentrer.

Ça te fait tout drôle de le dire à voix haute. La pensée trotte dans ton esprit depuis un moment déjà et c’est celle qui fait le plus de sens, mais… Tu te demandes parfois si c’est vraiment ce qu’il faut faire. Probablement.

- Pas tout de suite, j’ai encore quelques préparatifs à faire. Pour le voyage, précises-tu. Après tout, la route sera longue jusqu’au Pôle Sud et tu n’as jamais fait la traversée au sol, tu y étais allé essentiellement par bateau. Mais l’idée de peut-être… Peut-être pourrais-tu retourner au Nord, voir ta famille, prendre des nouvelles, quitte à être déjà parti pour un moment. Voir si Macha a trouvé le bonheur qu’elle mérite. Non. Il ne faut pas penser à Macha. Tu as quitté sa vie, il ne faut pas y retourner. Tu secoues la tête pour chasser ces pensées.

- J’ai encore beaucoup à apprendre auprès des miens. C’est ce que les dernières semaines m’ont apprises. Toi? Tu restes ici?

Il faut l’admettre, la camaraderie qui s’est installée entre vous va terriblement te manquer quand tu rentreras. Tu ne t’attendais pas à trouver dans ce petit bout de femme une partenaire inébranlable, une source de stabilité, mais surtout pas une telle confiance. Sur un champ de bataille, tu l’auais suivie aveuglément, sachant que vous couvririez tous les deux vos arrières.

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Qionghua était touchée par l'attention du cultivateur. Il n'était pas obligé de lui offrir cette crème cicatrisante, mais il avait tout de même fait le tour des marchands pour la lui trouver. C'était vraiment gentil et ce fut pour cette raison qu'elle appliqua immédiatement le contenu du petit pot sur sa blessure. Bientôt, cette dernière disparaîtra complètement et ne sera plus qu'un vague souvenir. La jeune femme questionna alors Atiqtalaaq sur ce qu'il allait faire maintenant. Après tout, il ne s'était pas rend au Royaume de la Terre par choix. Leur mésaventure dans le monde des esprits les avait fait atterri près d'Omashu, au moment où la guerre faisait rage. Ils étaient restés pour combattre, mais un semblant de paix s'était désormais installé. L'armée n'avait plus besoin d'aide.

Il hésita dans sa réponse. Il pensait à rentrer chez lui. C'était tout à fait normal. Qionghua hocha doucement la tête avant de se lever et de se rapprocher de son nouvel ami. Sauf qu'il ne partirait pas tout de suite. Le voyage serait long et il devait encore faire quelques préparatifs. « Je vois. » répondit-elle, tout simplement. À quoi bon le contredire ou l'encourager ? Si sa décision était prise, elle n'avait pas un mot à dire. Elle n'était, après tout, qu'une simple amie, un compagnon d'arme. S'il n'y avait pas eu cette histoire dans le monde des esprits, probablement qu'ils ne se seraient jamais rencontrés. Ce fut alors que Atiqtalaaq lui retourna la question, lui demandant si elle allait rester ici. Elle secoua alors la tête. « Non, je vais rentrer chez moi également. Ma shijie s'inquiète et ne cesse de me demander quand je vais revenir à Ba Sing Se. » Un petit sourire étira ses lèvres à cette pensée. Heureusement qu'elle avait sa shijie, qui était comme une vraie soeur pour elle. Qionghua n'était pas très proche des membres de sa famille biologique, à quelques exceptions près. « Tu dois te rendre au Pôle Nord ou au Pôle Sud ? » De mémoire, la secte de la Porte de l'Aurore Céleste était au sud, mais peut-être venait-il du nord ? Elle ignorait encore beaucoup de choses au sujet du jeune homme et elle ne savait donc pas où se trouvait exactement son chez soi. En même temps, elle lui posait la question afin de savoir si éventuellement ils pourraient faire un petit bout de chemin ensemble. S'il allait au nord, c'était dans cette direction que devait se rendre Qionghua. Il était toujours plus agréable de voyager en bonne compagnie plutôt que d'être seul. Surtout que les routes, ses derniers temps, n'étaient pas les plus sécuritaires. Elle se débrouillait en combat, elle pouvait se défendre, mais s'ils étaient plus nombreux qu'elle, ce serait pénible.

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Tu imagines très bien le lien qui peut unir Qionghua et sa shijie, n’est-ce pas le même qui te lie à Qillaq – outre le fait qu’il s’agit de ton cousin et que techniquement tu es en fait plus vieux que lui. Au même titre en fait qu’ils s’inquiètent pour vous, vous inquiétez pour eux aussi. En tout cas, toi tu t’inquiètes pour les tiens. Et si pendant que tu étais occupé à défendre Omashu les navires de la Nation du feu sont revenus pour leurs raids? Et si ta présence avait assuré la protection d’un maître de l’eau? Tu essaies de ne pas trop y penser en te disant que vu ton niveau actuel, tu n’aurais pas servi à grand-chose. Tout comme ici en fait. Tu as pris les armes, tu t’es battu pour cette ville qui n’est pas la tienne, pour défendre les innocents, mais ta présence était certainement assez dispensable. Toutefois, tu vois l’expérience comme une source d’apprentissage qui t’a permis d’en apprendre plus sur ta maîtrise, mais aussi comment utiliser l’énergie spirituelle dans une vraie situation de combat.

Devant sa question, tu hésites encore une fois. Ça semble pourtant si innocent, si légitime. Mais pour toi c’est compliqué. La maison, c’est le Pôle Sud, depuis des années déjà. Tu as tourné le dos à cette vie que tu avais chez tes parents. Toutefois, tes origines sont au Pôle Nord. Tu n’as pas de nouvelles des tiens depuis des lustres, outre un peu de cette rencontre fortuite avec Ahloy.

- La Porte est au Pôle Sud, c’est ma destination finale, mais… commences-tu à voix basse. Ça ne fait pas si longtemps que tu connais Qionghua, cependant, devant tout ce que vous avez traversé ensemble, tu te sens plus proche d’elle. Et contrairement à ta famille d’adoption, elle ne sait rien de ton passé, de ce que c’est d’être fiancé à quelqu’un qui ne veut pas de vous. Ou même de vos traditions.

- Mais… je ne sais pas. En vérité, je viens du Nord, c’est là que toute ma famille se trouve, enfin, presque.

Tu ne vas peut-être pas lui mentionner que ton aînée est le capitaine d’un bateau pirate. C’est peut-être mieux. Tu pousses un soupir.

- Ça fera bientôt 10 ans que je ne suis pas rentré. Et je me demande… je me demande si maintenant que je suis parti, je devrais en profiter pour… y retourner.

Tu rougis timidement. Ça ne te ressemble pas vraiment de t’ouvrir, normalement tu projettes plutôt l’image d’un garçon joyeux et insouciant – quand on apprend à voir au-delà de ton apparence de gros ours et qu’on réalise que tu as toujours ton cœur d’enfant.