Yinuo regarda dans le miroir qui ornait l’arrière-salle qui lui servait de bureau à Bao Ku. Prenant le temps de vérifier que son accoutrement et sa coiffure étaient parfaitement en place, elle ajusta les boucles d’oreilles qui ornaient son visage, ainsi la broche qui maintenaient ses cheveux en place. Les deux pièces étaient finement ouvragées et ornée de petites pierres précieuses issue des mines qu’exploitait son mari. Les bijoux n’étaient pas neufs, ils avaient été portés, travaillés, patinés mais ils restaient des pièces sur lesquelles il était impossible de mettre un prix. Ces pierres étaient les premières que son mari avait commandées pour elle il y a des années, avant l’ouverture de Bao Ku. Elles représentaient le début de leur commerce, d’un véritable partenariat. Lorsqu’il les lui avait offertes, Yinuo avait regardé son mari en s’attendant à ce qu’il y ait déposé du poison ou qu’il s’agisse d’une autre de ses lubies étranges pour la faire réagir. Elle avait pu voir l’exaspération se peindre sur ses traits alors qu’il lui promettait que c’était un cadeau sans danger. Elle secoua la tête, un petit sourire naissant sur ses lèvres. Une petite boule d’énergie déballa dans son bureau, suivit d’une servante affolée qui semblait au bord de l’épuisement. Son fils Shuai tenait davantage de son père que d’elle en terme de caractère. Enthousiaste, curieux et sociable, il représentait son opposé. Mais elle l’aimait plus que tout.

-« Maman, maman ! Est-ce que je dois vraiment aller chez Grand-mère et Grand-père ? Ils vont encore me faire peindre toute la journée et me forcer à rester assis sur une chaise… »

Sa petite moue la fit sourire et elle s’accroupit pour le regarder droit dans les yeux.

-« Maman ne peut plus leur tenir compagnie et tes oncles sont aussi occupé. Grand-père et grand-mère s’ennuie, est-ce que tu peux m’aider ? Cela leur fait toujours plaisir de te voir. »

La moue enfantine continua à se faire grognonne mais il hocha la tête, déposant un baiser sur sa joue avant de partir. Yinuo espérait que ses propres parents seraient plus doués pour lui enseigner la patience qu’elle ne l’était. Il était temps pour elle de se mettre au travail.

Yinuo déambulait dans la boutique, répondant aux questions des clients, ou s’asseyant derrière le comptoir pour vérifier la compatabilité. Elle n’avait pas encore à se soucier des stocks, mais elle réfléchissait au design de futurs modèles qu’elle espérait pouvoir proposer à la saison prochaine. Allant déposer ses papiers dans son bureau, elle retourna dans la salle centrale d’exposition. Avisant une silhouette qu’elle avait vue déambuler depuis plusieurs minutes, elle s’approcha avec un sourire poli et une petite courbette.

-« Bonjour, puis-je vous aider ? »

Le visage qui se présenta devant-elle lui était familier. Elle n’était pas nécessairement surprise de la voir ici, et son expression aimable et souriante ne changea pas d’un poil. Ruiling, Feng Ruiling. Les deux jeunes femmes avaient grandies ensemble, compagnon de jeu forcée par leurs familles respectives qui espéraient les voir déteindre l’une sur l’autre. Un échec cuisant, elles n’avaient jamais réellement réussit à s’apprécier et lorsque Yinuo s’était mariée, les deux jeunes femmes avaient cessés de se voir régulièrement. Yinuo ne détestait pas Ruiling, mais elle ne pouvait pas dire qu’elle était particulièrement… attachée à elle non-plus. Mais, Yinuo avait un standing et une réputation à maintenir.

-« Ruiling ! C’est un plaisir de te voir ici. Comment-vas-tu ? »

La jeune femme pouvait la rembarrée si elle le désirait, Yinuo n’était de toutes les manières pas très douée pour faire la conversation, surtout quand il s’agissait de parler de la pluie et du beau temps. Mais, elles avaient toutes les deux grandies, étaient devenus des personnes différentes, peut-être réussiraient-elles à ne plus complètement se dédaigner l’une l’autre. Être des adultes responsables était compliqué, mais elles n’avaient plus quinze ans.